GAGNE, La Vinicultivrogne
Paulin GAGNE
L'UNITÉIDE OU LA FEMME MESSIE
Poème universel en douze chants & soixante actes avec chœurs (Chaque Chant forme cinq actes) par Paulin Gagne, avocat, homme de lettres… Précédé d'un Prologue et suivi d'un épilogue par Mme Gagne (Elise Moreau de Rus)
Le poème se vend chez tous les libraires de France et de l'étranger, (Montélimar, Imprimerie Bourron) , s.d. circa1858
726 pages. In-8
CHANT HUITIÈME.
L’AGRICULTURE-UNITÉIDE.
La vraie agriculture est la meilleure mère,
Le soc de la charrue est l’âme de la terre,
Donnant à ses enfants les plus nobles essors,
La forte agriculture offre tous les trésors.
SOMMAIRE, PAR ACTE, DU CHANT HUITIÈME.
ACTE TRENTE-SIXIÈME ou LA VINICULTIVROGNE.
La scène se passe à la Courtille
Sommaire : PERSONNAGES PRINCIPAUX : La Vinicultivrogne, peuples, rois, ivrognes, etc.
ACTION : La Vinicultivrogne fait un discours dans lequel elle dit qu'elle adore le vin qui suffit pour tout nourrir ; elle ordonne de planter partout des vignes qu'elle a trouvé le moyen de guérir par la vaccine ; elle ordonne aux peuples de se griser continuellement pour faire de doux rêves d'amour et trouver le bonheur, etc. – La Vinicultivrogne triomphe et est couronnée par les peuples qui la célèbrent en chantant : Buvons tout pur, tout plein, etc.
ACTE TRENTE-SIXIÈME OU LA VINICULTIVROGNE.
La Vinicultivrogne avec qui tout s'enivre,
En tuant les mortels prétend les faire vivre.
SCÈNE 1.
La Vinicultivrogne, peuples, rois, ivrognes, etc.
LA VINICULTIVROGNE, ivre, du haut de l'Ivrognoratoire.
Peuples et rois, je suis la Vinicultivrogne,
Fille de la Nature et du Siècle en vergogne ;
Mes parents m'ayant faite en répandant du vin
J'ai toujours adoré ce nectar souverain ;
A quatre ans des tonneaux j'allais tirer les bondes
Pour y têter le vin qui jaillissait par ondes !
J'étais une ivrognesse à mes douze ans parfaits
A pouvoir tenir tête à trente polonais !
Peuples, l'ivrognerie est la plus douce chose
Elle permet toujours de voir la vie en rose,
Et lorsqu'il boit du vin à pleins pots constamment
L'homme peut se passer de tout autre aliment !
Depuis que jour et nuit sans cesse je m'enivre
Je me sens doublement et réjouir et vivre ;
Tous les rêves d'amour caressent mes sommeils
Et tous les rossignols chantent à mes réveils !
Je viens donc ordonner pour finir les disettes
Et pour vous enivrer de voluptés parfaites,
Je viens donc ordonner de planter en tous lieux
Des vignes dont le jus fit le nectar des dieux,
En supprimant soudain le blé, le seigle et l'orge,
Et tous autres objets dont le monde se gorge,
Attendu que le jus de la treille en raisin
Peut fort bien remplacer et la viande et le pain.
Ne craignez pas, amis, les sombres maladies
Qui, jadis, à la vigne offraient des morts impies :
J'ai trouvé depuis peu le remède fameux
De guérir à l'instant le choléra vineux !
Ce remède consiste à verser une goutte
De vin sur chaque cep que l'âpre mal déroute,
En faisant doucement une entaille à la peau
Pour l'introduction de ce vaccin nouveau
Qui, comme le vaccin de l'humanité folle,
Chassera pour toujours la petite vérole,
Et fera ruisseler des vignes en chaleurs
De multiples produits de vins pleins de liqueurs
Dont seulement un verre aux vapeurs ineffables
Fera rouler soudain les buveurs sous les tables !
Ainsi, peuples et rois, qui depuis trop longtemps
Ainsi que des poissons buvez l'eau des étangs,
Et qui devez dès lors brûler de la soif sèche
De savourer des vins purs de bois de Campêche,
Et qui vous donneront et la nuit et le jour
Des rêves couronnés par le plus vaste amour !
Hâtez-vous, hâtez-vous dans vos ivresses dignes
De couvrir tout le sol de treilles et de vignes,
C'est l'unique moyen d'être constamment gris
Et de changer ce monde en vineux paradis !
Hâtez-vous, pour chasser les colères bourrues,
Le vin doit comme l'eau ruisseler dans les rues,
Et dans un verre immense en chantant le bon vin,
L'homme doit toujours boire et tout pur et tout plein !
TOUS, chantant et buvant.
BUVONS TOUT PUR, TOUT PLElN.
O Vinicultivrogne,
Qui des vins les plus doux,
Sans aucune vergogne
Veux nous enivrer tous,
Oui, couronnant d'ivresse
Nos grands verres de vin,
Nous chanterons sans cesse :
Buvons tout pur, tout plein !
Puisque le vin nous donne
Le plus, cher aliment,
Et fait monter au trône
L'amour le plus charmant,
Nous boirons sans faiblesse,
Et par un gai refrain
Nous chanterons sans cesse :
Buvons tout pur, tout plein !
Nous couvrirons de vignes
Toute la terre en jus
Pour bien nous montrer dignes
De l'antique Bacchus ;
Repoussant l'eau traîtresse
Qui nous ronge le sein,
Nous chanterons sans cesse :
Buvons tout pur, tout plein !
Si les vignes malades
Sont sans fertilité,
Les peuples par rasades
Boiront à leur santé ;
Pour chasser leur tristesse
Et leurs larmes sans fin,
Nous chanterons sans cesse :
Buvons tout pur, tout plein !
Oui, puisque sur la terre
Le vin plein de douceur,
En chassant la misère
Apporte le bonheur,
Le cœur plein de tendresse
Pour ce nectar divin,
Peuples, chantons sans cesse :
Buvons tout pur, tout plein !
Christian ARNOU « Paulin Gagne et la Vinicultivtogne ».
Dessin à l’encre de chine. 2008. Collection Marc Ways & I.I.R.E.F.L.
© Tous droits réservés Christian ARNOU
LA VINICULTlVROGNE.
Peuples, par vos doux chants où ma gloire pétille
Vous avez illustré l'immortelle Courtille,
Et de l’ivrognerie aux destins triomphants
Vous vous êtes montrés les très-dignes enfants !
Allons pour couronner nos éclatantes fêtes
Faire un banquet de vins des qualités parfaites,
En chantant pour refrain, sur le ton le plus haut :
Buvons tout pur, tout plein, jusqu'à mort s'il le faut !
TOUS.
Vive, vive à jamais la Vinicultivrogne
Qui par le vin du monde illumine la trogne,
Et vient enfin donner au pauvre genre humain
L'esprit vrai qui toujours est dans l'esprit de vin !